De l'ombre jaillit la lumière...

Les brumes de la « petite mort » se dissipèrent peu à peu.
Elle gisait à même le sol, ses oreilles bourdonnant encore du bruit assourdissant.
Sa sœur jumelle, elle aussi, tentait de retrouver ses esprits.
Le grand prêtre était là, près d’elles, exerçant son pouvoir, leur redonnant lucidité et forces.
Puis d’un simple geste, il les convia à le suivre. Quelques minutes plus tard, installées confortablement autour d’un feu gigantesque, entourées par d’autres elfes de sang, bercées par l’histoire qu’il était en train de leur conter et buvant chacune de ses paroles, elles se remémoraient les derniers évènements dont elles avaient été victimes ainsi que tous ceux qui étaient là.

Leurs visages étaient sombres, leurs traits fatigués et la tristesse qu’on pouvait lire dans leurs yeux en disait long sur le terrible épilogue qu’il leur narrait et auquel elles n’avaient pas participer.
Le Grand prêtre leur fit le récit de l’ assaut du fléau, de la monstruosité du Roi Liche, de la déferlante d’horreur et l’état dans lequel se trouvait à présent leur belle capitale, Lune d’Argent, mais aussi le reste d’Azeroth.
Rien n’avait été épargné, tout n’était que désolation, mort et puanteur.
La grande puissance d’autrefois était à présent divisée. Les ennemis étaient toujours les mêmes mais s’y était ajouté un nouveau danger. Certains avaient cru bon de former une nouvelle coalition : l’Alliance.

Après son récit, il s’empressa de redonner courage et sollicita que chacun d’eux se batte pour sa race mais aussi pour tous ceux qui leur étaient restés fidèles. Ils devaient, tous ensemble, faire front ! Ils jurèrent de se battre jusqu’à la mort, s’il le fallait, ils faisaient à présent tous partie d’une même et grande famille : La Horde.

Morthèll était d’un tempérament impulsif et combatif. N’ayant peur, ni de la bagarre ni de la magie noire, elle se complaisait dans l’entourage des démonistes, espérant pouvoir, un jour, invoquer des démons, du plus petit mais puissant au plus imposant et cruel.
Fidhèll était timide, toujours dans l’ombre de sa jumelle, elle n’en était pas moins en reste. C’est elle qui veillerait sur la santé de tous, sa sœur, bien sûr, mais aussi ses futurs démons et les amis qu’elles s’apprêtaient à rencontrer au fil de leurs pérégrinations à venir.
Tout les opposait, l'une brune et athlétique, l'autre blonde platine et frêle, rien ne semblait effrayer la première tandis que la seconde restait à l'écart et constament aux aguets.
Elles étaient le blanc et noir, le yin et le yang, le bien et le mal, l'ange et le démon, jamais l'une sans l'autre, à elles deux, elles étaient prêtes à braver l'univers.

La tâche qui leur fut confiée était simple : Voyager à travers Azéroth, les Royaumes de l’est d’abord, puis Kalimdor, se porter volontaires pour rendre service à tous ceux qui demanderaient leur aide, rester vigilantes et surtout abattre sans remords ni pitié tous les ennemis de la Horde, quelque soient leur taille, leur nombre ou leur race.
Chaque mission leur apporterait de l’expérience et peut être qu’un jour, elles seraient capables d’aller en Outre-Terre puis en Nordfendre et affronter enfin le Roi Liche.

Aujourd’hui, elles ont parcouru Kalimdor, de long en large et les Royaumes de l’est, du nord au sud.
Elles ont étudié, sont devenues de puissantes démoniste et prêtresse. Ensemble, elles ont guerroyé, apporté leur aide et leur soutien, comme elles l’avaient juré, devant le Grand feu et sous le regard du Grand prêtre.

C’est un Grand jour, elles sont fin prêtes pour le Grand voyage, l’Outre-Terre. Ce n’est pas encore l’Ultime voyage, celui qui les emportera dans les terres glacées de Nordfendre, combattre l’Ultime ennemi, mais elles s’en approchent et se sentent fières d’appartenir à la Horde.

Pourtant, elles ont l’impression d’un manque. Quelque chose les retient encore.
Elles n’ont laissé aucune trace de leur passage, elles n’ont pas semé les petits cailloux qui, elles en sont sûres, pourraient aider les plus jeunes à aller de l’avant et à se sentir soutenus, comme elles auraient aimé l’être.
Elles se souviennent du Grand Feu et bien que vacillantes et apeurées qu‘elles étaient ce jour là, elles sentaient en elles l’onde chaleureuse que leur prodiguait l’assemblée toute entière…

Un endroit où elles pourraient venir en toute sécurité, se détendre, se reposer, encourager, préparer avec sérénité leurs prochaines missions… Partager leur expérience, échanger les bonnes adresses ou tout simplement écouter le récit d’un voyageur solitaire…
Oui, c’était ça, voilà ce qui leur manquait… une taverne, un drapeau et d’autres ressortissants de la Horde, qui comme elles se battaient aux quatre coins du globe !
Un simple regard leur suffit pour savoir qu’elles étaient en parfait accord.

Elles ont fini par trouver un bâtiment délabré, dont l’intérieur gris et poisseux semblait n‘avoir jamais vu âme qui vive . Armées de leur seul courage, elles ont dépoussiéré, arrangé et décoré cette bâtisse de vieilles pierres ocre jaune faites de la terre sablonneuse de Durotar. Trouver une baraque à l’abandon au sein même de Orgrimmar, la capitale des Orcs relevait de l’impossible, mais c’est un fait : elles l’ont trouvée et s’en réjouissent.

Quelques jours ont passé, la taverne regorge de mets tous plus appétissants les uns que les autres. Les boissons ne sont pas en reste, eau, lait, vins de tous les coins, même reculés, rhum de contrebande venant de la Vallée de Strangleronce et surtout la bière volées aux nains… Un vrai plaisir de voir cette boisson ambrée couler des barils chipés aux Contreforts de Hautebrande ou encore dans la région de Forgefer ! Ces nains … ils savent tout de même faire une excellente bière !!!

La porte grince encore, faute d'avoir été utilisée souvent, le bar s’étale sur le côté de l’immense pièce, sa couleur rouge flamboyant attire irrésistiblement le regard. Environ vingt tables basses entourées de fauteuils confortables sont disséminées, certaines en pleine lumière, d’autres dans l’ombre, laissant ainsi le choix à chacun de s’installer où il lui convient.
A côté de l’entrée se dresse une table ronde de petit diamètre sur laquelle trône le livre d’or. Gravé en lettres majuscules, ce livre contient la charte de leur association et contiendra plus tard, du moins elles l’espèrent, la signature de chacun de ceux qui les rejoindront.

Les Maitres de Vie, c’est ainsi qu’elles la baptisent ! Parce que la vie de leurs membres et amis sera leur priorité…
Bien décidées à faire de cette communauté, un exemple de charité, d’entraide, de compréhension et de respect, elles étudient avec soin chaque mot gravé.

Elles se sentent en parfaite harmonie dans ce lieu magique qui était, il y a encore quelques jours, un épouvantable et cauchemardesque capharnaüm. Tout est prêt. Un simple mot sur la porte entrouverte permettra, à quiconque souhaite entrer, de se reposer, manger ou se désaltérer, de trouver un endroit confortable et accueillant.

Le livre d’or, en évidence sur le guéridon, encouragera, peut être, certains à se joindre à elles. C’est du moins ce qu’elles espèrent du fond du cœur !

Fidhèll a choisi une table dans un renfoncement, face à la porte, un peu à l’écart et dans l’ombre, elle reste comme d’habitude la timide et farouche prêtresse que Morthèll admire en secret tandis qu’elle se moque ouvertement mais gentiment de l’effacement constant de sa jumelle.
Elle a tiré 2 bières ambrées avec juste ce qu’il faut de mousse bien blanche. Elles les apporte à table et toutes les 2 décident que cette soirée sera dédiée à l’ouverture de la taverne des Maitres de Vie.
Elles vont passer la nuit ici, buvant et mangeant, inspectant dans leurs têtes, chaque détail, s’assurant qu’elles n’ont rien oublié.
Elles se reposent tout en préparant, l’esprit tranquille, leur prochain départ dans un monde parfaitement inconnu mais certainement plein de dangers qu’elles devront, une fois de plus, affronter toutes les deux, plus solidaires que jamais…

Le jour glisse peu à peu, la lumière si vive qui entrait par les encadrements disjoints de la lourde porte en bois, s’éteint lentement laissant place au mince filet blanchâtre de la lueur de la lune. Les mains sur leurs bâtons, plus par habitude que par crainte, elles se sentent réellement en confiance. Leur esprit s’ankylose doucement, entre rêve et réalité, les 2 sœurs laissent venir le sommeil réparateur.

La porte toujours entrouverte…