Une étoile s'éteint, une autre s'éveille...

La famille était au complet.

Enfin presque. Seul Lotharion manquait à l'appel.

La dépouille de Devaryn reposait là, dans un énorme cercueil de pierre, sur lequel avaient été gravées les réussites familiales, et rehaussé de feuilles d'or, pour marquer le rang de la famille.

Beaucoup de gens étaient présents. Certains par affection, d'autre par pitié. Mais ce qui révulsait le plus les parents de Devaryn, étaient ces aventuriers qui ne venaient que pour grappiller les restes de ses possessions en arguant avoir rencontré leur fille et échangé la promesse de tenir un objet précieux lors de la disparition de l'un d'eux. Personne n'était pourtant dupe.

Alors que, terrassé par le chagrin, le père de Devaryn s'apprêtait à refermer le sarcophage doré qui allait être enseveli près des leurs, Lotharion fit bruyamment irruption dans la chapelle. Sa famille eut du mal à le reconnaitre du premier coup d'œil, tant les pièces d'armure qu'il portait contrastaient avec la prestance quotidienne du port de la robe de Mage.

Les veilleurs se figèrent, jetant un regard affolé à la famille de la défunte, ne sachant que faire. Arrêter le profanateur, pourtant frère de la victime, ou laisser son chagrin s'exprimer à sa façon, même si cette manière d'entrer dans le sanctuaire blasphémait le repos des pairs auxquels on rendait hommage sous cette coupole.

Le géniteur ft signe de laisser faire, mais son visage trahissait la colère qui aurait explosé dans un autre lieu que celui-ci.

Lotharion s'approcha rapidement et s'agenouilla devant son père et sa mère. Il fit un rapide signe de tête aux proches de la famille et se releva pour se rendre près du corps de sa sœur bien aimée. Il posa sa main sur les bras croisés de la dépouille et parla :

"Ma Sœur, tes amis et frères du Clan des Maîtres de Vie m'ont fait part de ton acharnement à combattre le mal par monts et par vaux. Je jure devant mes pairs, que jamais je ne faillirais à ta vengeance, et ce, jusqu'à ce que mon esprit te rejoigne dans le royaume des âmes!"

Il se détourna et se dirigea vers les portes, lorsque sa mère lui agrippa la main et lui chuchota en sanglotant : "Mon fils, venge la, venge nous, pour notre Famille et pour Lune d'Argent..."

Sa silhouette disparut dans la lumière du jour et il partit, bien décidé à faire mordre la poussière à tous ceux qui se mettraient en travers de sa route, au nom de la vengeance, au nom de Devaryn !

Même si je n'ai pas eu le droit de voir le cadavre, il parait que les démonistes ne sont pas bien vus, je souhaite à Devaryn une bonne continuation dans l'autre monde, et à son frère une bonne continuation dans notre bonne guilde.

Morthèll arriva très tôt. Bien que plus audacieuse dans la bagarre que sa sœur, elle se sentait fragile et pas vraiment à la hauteur dans de telles circonstances.
Mais elle se devait d’être présente par loyauté et en souvenir de leur amie, elle avait, également, promis à sa jumelle de les représenter toutes les deux. Fidhèll luttant contre les fièvres, après avoir été laissée pour morte, était encore alitée.

Après une profonde inspiration, Morthèll ouvrit la lourde porte de la chapelle. Elle était seule, personne n’était encore arrivé.
Dans la grande salle vide et froide, sous la coupole, un lourd cercueil de pierres rehaussé de feuilles d’or, dans lequel était allongé le corps, sans vie, de leur loyale et fidèle amie, était posé à même le sol.
Morthèll s’approcha, sans bruit et s’agenouilla près de Devaryn, la plus ancienne des Maitres de Vie, la paladine au cœur d’or profondément caché sous son armure de plaques.
Mais, aujourd’hui, elle n’était plus qu’une jeune femme fragile à qui on avait prématurément ôté la vie.

Morthèll rendit ses hommages, des souvenirs plein la tête des combats, des explorations et des missions qu’elle avait partagés avec la paladine et sa sœur ainsi que tout le clan des Maitres de Vie. Bien que le chagrin enserrait son cœur au point de le faire éclater, Morthèll ne put s’empêcher de sourire tant les souvenirs qui lui revenaient étaient emplis de joie et de bonne humeur.
Elle ne pria pas pour le repos de son amie. Elle savait que son âme ne serait en paix qu’une fois vengée. Elle savait, aussi, que le clan se devait de conserver précieusement sa mémoire.

La porte de la chapelle s’ouvrit, laissant entrer un homme majestueux, donnant le bras et soutenant une femme dont les yeux étaient embrumés de larmes. Suivaient d’autres hommes, en grande tenue, et leurs femmes vêtues de noir. Derrière, une horde, venue plus pour le prestige et les biens de la famille que pour honorer la mémoire de la défunte, s‘éparpillait dans la chapelle.

Morthèll ne put empêcher un rictus de déformer ses lèvres, la ronde des vautours allait commencer… Elle se leva, s’inclina devant les parents de Devaryn et s’éloigna dans l’ombre de la chapelle.
Comme elle l’avait promis à sa jumelle, elle assisterait à la cérémonie mais de loin afin de ne pas en entraver le cours.

Tout se déroula dans un recueillement total, seulement troublé, parfois, par quelques gémissements de douleur. Le sarcophage allait être refermé, lorsque la lourde porte s’ouvrit à nouveau, presque violemment, laissant entrer un homme d’une grande prestance et dont l’armure de métal lourd laissait penser à un puissant chevalier, ou tout du moins, à un combattant chevronné.

Un murmure parcourut la chapelle, les têtes se tournèrent vers la famille, le père de Devaryn, les mâchoires et poings serrés fit signe de laisser passer.
L’homme inclina légèrement la tête dans sa direction puis s’avança d’un pas sûr, vers le cercueil.
Son allure changea totalement, il s’agenouilla, ses traits se figèrent et ses yeux s’humidifièrent. Il baissa la tête, pris la main de Devaryn dans les siennes, décroisant ainsi ses bras qui étaient sur sa poitrine et se mit à lui parler.

"Ma Sœur, tes amis et frères du Clan des Maîtres de Vie m'ont fait part de ton acharnement à combattre le mal par monts et par vaux. Je jure devant mes pairs, que jamais je ne faillirais à ta vengeance, et ce, jusqu'à ce que mon esprit te rejoigne dans le royaume des âmes !"

Morthèll, bien que dans l’ombre, n’était pas très éloignée de la scène et put entendre ses paroles.
Selphius, le frère, dont Devaryn leur avait parlé de temps à autres, était venu faire ses derniers adieux à la sœur qu’il avait tant aimée.

A peine eut-il terminé de prononcer ces quelques mots, qu’il se leva, redressa la tête, bomba le torse et sortit du même pas sûr qu’à son arrivée. Un dernier signe de tête en direction de la famille et il franchit la lourde porte de la chapelle.

Morthèll maudissait son audace sur les champs de bataille, qu’elle aurait voulu, pour une fois, avoir dans une telle situation. Décidément, elle était l’opposé de sa jumelle. Si prompte à la bagarre et si empotée avec les gens, alors que Fidhèll aurait été dans son élément, aujourd’hui, et aurait parfaitement su comment se présenter, elle et les Maitres de Vie à ce courageux et valeureux combattant.

Elle se glissa subrepticement hors de la chapelle, jetant un dernier regard, plein de chagrin et de douleur à sa fidèle amie, s’inclinant en passant devant la famille et rejoignit, d’un pas leste, le chevalier en armure qui avait déjà empoigné la bride de sa monture.

Elle s’approcha, le salua et se présenta.
Son air sévère laissa place à un visage plus détendu bien que triste, il la salua à son tour et l’écouta attentivement.
Ils restèrent un bon moment à parler de Devaryn, à citer ses louanges, son courage, sa loyauté et son cœur d’or.
Puis, ils se quittèrent. Morthèll regarda s’éloigner la monture qui filait comme l’éclair.

Son cœur était lourd, à présent. Bouleversée par l’intensité de la cérémonie, la perte d’une très chère amie et les paroles de Selphius.
Elle avait espéré qu’il rejoindrait les Maitres de Vie, qu’il aiderait le clan à venger la mort de Devaryn, la paladine, au cœur de velours dans son armure de fer, mais il n’en était rien, du moins pour le moment.

Selphius était trop bouleversé par la mort inattendue et prématurée de sa sœur, et ne se sentait pas de taille à affronter le clan, pas encore. Il souhaitait faire une retraite en un lieu perdu et silencieux, face à lui-même. Faire le point, faire le vide, prendre du recul…
Un jour, peut être, mais il n’avait rien promis, un jour, il reviendrait et prendrait place chez les Maitres de Vie.
Ce jour là, si cela arrivait, il guiderait le clan et tous vengeraient leur amie…

Morthèll enfourcha sa monture démoniaque et se mit en route pour rejoindre sa jumelle. Une lourde tâche l’attendait encore.
Elle devait informer sa sœur mais aussi tous les Maitres de Vie, que Devaryn n’était plus et que Selphius devait parcourir le monde à la recherche de lui-même, avant de venir, un jour, les rejoindre. Un jour, peut être …


//HRP//

Désolée pour les pavés que je laisse à chaque fois... RP quand tu nous tiens !
Mais vous n'êtes pas obligé de les lire !!!